Champagne séraphique, ou de Julien Champagne à Bernard Chauvière. C'est avec un plaisir que je souhaite vous faire partager que je reviens maintenant sur mon post du 26 février 2006, Julien Champagne et Cimiez.
J'y mentionnais déjà le nom de Bernard Chauvière, et le titre de son seul ouvrage paru à ce jour, Parcours alchimique à l'usage d'un opératif, Liber Mirabilis, Londres, 2000.
Préfacé par Roger Bourguignon, son livre publié par Jean-Marc Savary est à la fois, suivant le préfacier, un hommage "à notre vieil ami commun décédé: Eugène Canseliet" et "à son maître disparu dans le temps sous le pseudonyme de Fulcanelli."
Roger Bourguignon ajoute ces mots: "Doreur de son métier, Bernard possède le don de dessiner et de peindre de façon innée."
On pourra vérifier la justesse de cette assertion à condition d'ouvrir ce livre, car Roger ne manque pas également de citer ces fortes paroles d'Oulougbeg (Madressa de Boukhara): "La bénédiction du Prophète soit ouverte à ceux qui possèdent la sagesse des livres."
C'est ainsi que nous pourrons alors retrouver la Sophia du médaillon installé sur le pilier séparant le portail du jugement à Notre Dame de Paris, et comparer le trait classique d'un Champagne précurseur, déjà commenté le 05 février 2006 (Julien Champagne dessine l'alchimie), à celui, plus rude et contemporain, de Bernard Chauvière.
Chauvière a en fait consacré l'essentiel de son écrit à la croix séraphique du monastère de Cimiez. A cet endroit de son oeuvre, il observe, s'agissant de cette croix:
"Trois...personnages tiennent dans la main gauche un livre fermé à l'exemple de Louis de Toulouse...
Les trois livres clos expriment la matière première de l'oeuvre extraite de son gîte minier et qui, à l'issue des trois réitérations, devient alors philosophique. Elle est ainsi symbolisée par le livre ouvert."
Pour en revenir à Cimiez, Bernard Chauvière nous confirme d'emblée dans notre impression initiale:
"Eugène Canseliet nous rapporta que c'est en l'année 1917, alors qu'il était un tout jeune homme et qu'il résidait à Aix-en-Provence, qu'il se rendit en compagnie de Fulcanelli au Monastère de Cimiez."
Il poursuit ainsi:
"A l'extérieur, et près de l'église, se trouvait alors une colonnade torsadée faite de marbre blanc, supportant sur son chapiteau une croix sur laquelle était crucifié un séraphin. Cela suscita chez l'adepte contemporain un vif intérêt. Julien Champagne en fit un dessin."
Bernard Chauvière décrit ainsi cet angelot:
"Sur le côté midi, au centre, figure le séraphin. Il est muni de trois paires d'ailes, dont deux sont déployées le long des bras latéraux de la croix. La troisième repliée en forme d'X, recouvre les jambes du crucifié."
Pour lui, la signification de cet emblème est multiple.
"Exotériquement, il nous rappelle la stigmatisation de saint François d'Assise, qui fut ensuite admis auprès du créateur sous l'apparence d'un séraphin.
Esotériquement, il figure la partie seconde du grand oeuvre, nommée par les anciens auteurs: anciennes sublimations."
Et de préciser:
"Le feu enclos dans la terre, cette particule mondée, cette énergie, le séraphin de la croix de Cimiez nous le rappelle, par la disposition de ses deux ailes repliées en forme d'x, recouvrant ses jambes."
A ces sublimations ou aigles, Eugène Canseliet a consacré tout un chapitre de son alchimie expliquée (Pauvert, 1972).
En voici un extrait qui me semble parlant:
"Entre les deux parties, saline et mercurielle, en parfaite fusion, l'une au-dessus de l'autre, la transmission spirituelle est assurée.
La terre suffisamment pénétrée, libère son soufre ou, si l'on veut, son esprit qui passe dans le bain de mercure sous-jacent, en conséquence de cette propriété, que possède le dissolvant philosophique, d'attirer à soi, tel un aimant, tout ce qui est spirituel."
Et de mentionner lui aussi, au même chapitre, la visite faite avec Fulcanelli au monastère de Cimiez.
Sur ce monastère, je voudrais signaler ici, en passant, la thèse récente de Virginie Malbouires: Les emblèmes du monastère franciscain de Cimiez à Nice, ANRT, 1996.
Etude sérieuse, quoique conventionnelle dans sa prudence bien universitaire, et qui conclut sans conclure au caractère possiblement alchimique des dits emblèmes.
Sur la croix séraphique de Cimiez, citons aussi cet article de la ville de Nice:
http://www.nice.fr/mairie_nice_693.html
Mais je me suis laissé dire qu'un nouveau livre sur ce sujet, écrit lui par un alchimiste de l'école de Fulcanelli et d'Eugène Canseliet, nous permettra bientôt d'actualiser et de préciser celui de Séverin Batfroi: Alchimiques métamorphoses du mercure universel, Guy Trédaniel, 1977, déjà consacré à Cimiez...
En attendant, laissons le mot de la fin à Roger Bourguignon, à qui, quelques mois avant sa disparition, Eugène Canseliet confia:
"Cher Roger, je n'aurais pas cherché la pierre philosophale pendant plus de cinquante ans, si je n'avais vu de mes yeux la réussite de Fulcanelli.
Je ne suis tout de même pas un vieux radoteur. Croyez-moi, Roger, c'est le seul but valable sur cette terre. Il n'y en a pas d'autre!"
http://maxjulienchampagne.over-blog.it/article-champagne-seraphique-83879248.html
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