Le moment est sans doute venu de faire plus ample connaissance avec une autre relation de Julien Champagne, que nous aurions pu déjà rencontrer quand nous avons évoqué Louise Barbe, modèle de notre peintre.
Jules Boucher (1902-1955) a comme Louise Barbe, travaillé à la société Poulenc.
Personnalité complexe, voire controversée, comme nous le verrons, ce chimiste reste aujourd'hui connu pour des travaux d'inspiration maçonnique et martiniste, qui traduisent aussi son penchant pour la magie.
Citons son article Du martinisme et des ordres martinistes (1950), et ses livres Manuel de magie pratique (1941 et 1953), et La symbolique maçonnique (1948).
En 1948 justement, il fonda un ordre martiniste rectifié. Mais pour en revenir à Julien Champagne, il le connaissait dès 1922. Selon Geneviève Dubois, il l'aurait rencontré cette année là, par l'intermédiaire d'un parent de Julien qui travaillait également chez Poulenc.
Il est à noter que Champagne prit alors, semble-t-il, Boucher pour disciple en alchimie (ainsi que d'autres, dont un autre employé de Poulenc, Gaston Sauvage, que nous avons déjà rencontré à Sarcelles), et se faisait passer auprès de lui pour Fulcanelli. Il lui a d'ailleurs dédicacé Le Mystère des Cathédrales en signant "A.H.S. Fulcanelli."
D'après Robert Ambelain, les deux hommes ne se quitteront plus, dès lors, jusqu'à la mort de Julien. Eugène Canseliet conteste ce point (cf. le dossier Fulcanelli de La Tour Saint-Jacques).
Il est à noter à ce propos qu'Ambelain est proche intellectuellement de Boucher, comme Robert Amadou le sera ensuite d'Ambelain, à ce que nous croyons savoir.
Toujours est-il que cette amitié entre Champagne et Boucher entraînera le premier à rejoindre le second dans des activités sulfureuses, au sein de la confrérie -dirait-on aujourd'hui la secte?- du Grand Lunaire, que fréquenta aussi Gaston Sauvage, et où Boucher qui aimait les pseudonymes (Léo Rober, Julius Bellifer, Julius Hucerbo, Onésime Chagorne, Hugues Colbert), portait le nom évocateur d'Herjus le Bouc.
Ce qui, explique Eugène Canseliet, contribua fortement à lui aliéner la "protection puissante" de Fulcanelli.
Selon Ambelain, à la mort de Champagne, en 1932, Boucher aurait pris à son domicile les originaux des planches illustrant les ouvrages de Fulcanelli, ainsi que d'autres documents. Canseliet relève à propos de ces dessins originaux qu'ils étaient sur bristol. Que sont-ils devenus?
En 1935 et 1936, Boucher publia, sous les initiales J.B., divers articles à connotation alchimique dans la revue Votre Bohneur, devenue ensuite Consolation. Utilisa-t-il pour ce faire certains documents pris chez Champagne? En tout cas, un de ses articles, reproduit par Dubois, a trait à la croix cyclique d'Hendaye, dont nous espérons pouvoir reparler, croix qui fera l'objet d'un ajout par Canseliet aux nouvelles éditions, parues après la seconde guerre mondiale, du Mystère des Cathédrales de Fulcanelli.
Boucher était d'ailleurs sincèrement persuadé à mon avis que Champagne, qui se faisait volontiers passer pour ce qu'il ne fut pas, était Fulcanelli. C'est ainsi qu'il dédicacera à Fulcanelli-Champagne son Manuel de magie pratique (Niclaus, 1941).
En 1952 encore, il publiera dans la revue Initiation & Science des commentaires au traité alchimique Science écrite de tout l'art hermétique (1731), qui dit-il, "résultent de notes prises au cours d'entretiens avec notre regretté Maître et ami: Fulcanelli."
Nous espérons que cette chronologie parlera suffisamment au lecteur. Et à propos de date, puisque nous venons d'évoquer Le Mystère des Cathédrales, précisons au passage que Canseliet, dans une de ses préfaces, y écrit clairement que c'est en 1905 que Julien Champagne fit la connaissance de Fulcanelli.
http://maxjulienchampagne.over-blog.it/article-32325988.html
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