Revenons maintenant au Mystère des Cathédrales de Fulcanelli, et à son édition originale de 1926 (Jean Schemit). La planche IV due aux dessins de Julien Champagne en est intitulée: Notre Dame de Paris- Portail du Jugement.
Le stylobate de la façade, qui se développe et s'étend sous les trois porches, nous explique Fulcanelli, est tout entier consacré à la science alchimique.
Sur les faces latérales des contreforts qui limitent le grand portail, nous trouvons, à hauteur de l'oeil, deux petits bas-reliefs encastrés chacun dans une ogive.
Ces bas-reliefs constituent les motifs de notre planche, qui comprend deux médaillons, dont le premier, celui du pilier gauche, s'appelle: La Fontaine mystérieuse au pied du Vieux Chêne.
Il nous présente, commente Fulcanelli, la Fontaine mystérieuse que le Trévisan décrit dans la Parabole finale de son livre sur la Philosophie naturelle des Métaux:
"L'artiste a cheminé longtemps; il a erré par les voies fausses et le chemins douteux; mais sa joie
éclate enfin! Le ruisseau d'eau vive coule à ses pieds; il sourd, en bouillonnant, du vieux chêne creux."
Et Fulcanelli d'ajouter, charitablement, en note de pied ou de bas de page:
"Note ce chêne", dit simplement Flamel au Livre des Figures Hiéroglyphiques."
Et de conclure:
"Notre Adepte a frappé le but. Aussi, dédaignant l'arc et les flèches avec lesquelles, à l'instar de Cadmus, il transperça le dragon, il regarde ondoyer la source limpide dont la vertu dissolvante et l'essence volatile lui sont attestées par un oiseau perché sur l'arbre."
En face du motif sculpté traduisant les propriétés et la nature de l'agent secret, nous allons maintenant assister, sur le contrefort opposé, à la cuisson du compost philosophal.
L'artiste, cette fois, veille sur le produit de son labeur:
"Revêtu de l'armure, les jambes bardées de grèves et l'écu au bras, notre chevalier est campé sur la terrasse d'une forteresse, si nous en jugeons par les créneaux qui l'entourent.
Dans un mouvement défensif, il menace du javelot une forme imprécise (quelque rayon? une gerbe de flammes?), qu'il est malheureusement impossible d'identifier...
Derrière le combattant, un petit édifice bizarre, formé d'un soubassement cintré, crénelé et porté sur quatre piliers, est recouvert d'un dôme segmenté à clef sphérique.
Sous la voûte inférieure, une masse aculéiforme et flammée vient en préciser la destination." Et Fulcanelli nous dévoile alors l'interprétation qu'il propose de cette dernière:
"Ce curieux donjon, burg en miniature, c'est l'instrument du Grand-OEuvre, l'Athanor, l'occulte four aux deux flammes, - potentielle et virtuelle, - que tous les disciples connaissent et que nombre de descriptions, de gravures ont contribué à vulgariser."
Le titre de cette partie de la planche est effectivement: L'Alchimiste protège l'Athanor contre les influences extérieures.
Et, de fait, elle nous rappelle fortement l'emblème XX de l'Atalante Fugitive de Michel Maier:
http://hdelboy.club.fr/embleme_20.jpg
reproduit et commenté par Eugène Canseliet dans ses Trois anciens traités d'alchimie, déjà mentionnés (Planche III).
Pour donner enfin à Julien Champagne une compagnie digne de lui, et de Fulcanelli et Canseliet,, j'ai pensé qu'il pourrait vous être agréable de contempler finalement à cette occasion cette oeuvre de Maximilien Luce sur Notre-Dame de Paris.
Datée de 1901, elle se trouve actuellement au Musée d'Orsay. Elle est intitulée Le quai Saint-Michel et Notre Dame de Paris:
http://www.insecula.com/oeuvre/O0015729.html
Maximilien Luce (1858-1941) est généralement considéré comme un peintre néo-impressioniste; de tendance anarchiste, ce qui aurait sans doute plu à Julien Champagne comme à Eugène Canseliet, et pourquoi pas, aussi à Fulcanelli; il fut un élève de Camille Pissaro, avant de devenir un proche, notamment, de Georges Seurat et Paul Signac.
Sur son tableau, les trois porches de la cathédrale sont nettement visibles.
http://maxjulienchampagne.over-blog.it/article-champagne-au-portail-du-jugement-35787657.html
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