...consacré à l'artiste français Julien Champagne (1877-1932), à sa vie et à ses oeuvres.
Peintre et dessinateur, Julien Champagne est surtout connu de nos jours pour avoir illustré les ouvrages de Fulcanelli, un mystérieux alchimiste contemporain.
Et pourtant, il figure au Bénézit, la "Bible" internationale des créateurs. Et suivant son ami Eugène Canseliet, il fut bien un maître du pinceau et du crayon.
C'est à la découverte de cet artiste méconnu, mais profondément attachant, que je voudrais vous inviter. Je voudrais aussi vous demander de ne pas hésiter à enrichir mes articles de vos propres commentaires et de vos découvertes personnelles.
Bon voyage donc au pays légendaire de Julien Champagne.
Chers amis et amies, nous espérons que compte tenu des circonstances épidémiologiques et autres (météorologiques notamment) vous passez un été aussi confortable que possible.
Ceci n'est donc qu'un petit billet de vacances, qui n'a d'autre but que de vous informer brièvement sur l'actualité de notre cher Julien Champagne.
Et bien figurez-vous qu'elle est riche, puisque grâce aux éditions Hadès, nées en 2012 et devenues depuis Ethos, "Hubert" a une fois de plus les honneurs des couvertures de rééditions des deux premières oeuvres de Fulcanelli, Le Mystère des Cathédrales et Les Demeures Philosophales.
Pour la première, nous vous l'avions déjà signalée (confer notre article Hadès de Julien Champagne, 2017).
S'agissant de la seconde, elle a été réalisée fin 2020, et nous venons d'en prendre connaissance, à l'occasion d'un récent pèlerinage parisien (à la librairie Gibert près du musée de Cluny, hélas fermé pour travaux jusqu'à l'an prochain).
Ethos propose d'ailleurs aux amateurs éclairés que nous sommes tous et toutes un "pack Fulcanelli" à un prix relativement modique:
Si vous voulez être certain(e)s de commander la version Ethos et non Hadès du Mystère, je vous conseille de le spécifier par courriel:
contact@editionsethos.com
Pour le reste, c'est une belle édition, avec ses qualités (toutes les gravures de Champagne, plus des photos réussies ou moins réussies et toutes les préfaces d'Eugène Canseliet, plus tous les chapitres des éditions Pauvert). Evidemment, les éditions Alcor ont présenté un travail moins complet, quoique d'un meilleur niveau (Mardi-gras de Julien Champagne, 2013 et Champagne en Alcor, 2014), mais les deux entreprises nous semblent dignes d'intérêt.
J'attire pour terminer votre attention sur la présence de certain volatile (beau corps ou corbeau) ornant les deux couvertures d'Ethos. Celle des Demeures en particulier est illustrée par une gravure de Julien dont nous avions déjà évoqué l'existence, notamment en 2018 (Champagne au muguet de mai). Vale,
C'est toujours un bonheur que d'ouvrir un catalogue de la librairie La Fontaine d'Aréthuse d'Ariane Touze.
Celui qui vient de nous parvenir (le numéro 27) tient une fois de plus toutes ses promesses, s'agissant notamment de la première de ses rubriques: Alchimie et hermétisme.
Mais je laisse aux heureux élus la joie de le découvrir, et aux autres -ceux du moins qui le souhaiteront- la possibilité de le demander.
Il est comme souvent, et j'en viens à mon propos du moment, agrémenté de plus d'un supplément "manuscrits & autographes" en forme de feuilles volantes, et d'emblée nous pouvons y lire le nom d'un certain Jean-Julien Champagne.
De quoi s'agit-il ici, se serait sans doute et dès lors opportunément demandé un certain maréchal Foch?
Notre amie libraire nous l'explique aussitôt: C'est un "précieux recueil intitulé Hermétisme comportant d'importantes notes inédites de Champagne en marge du texte d'un traité alchimique : Science écrite de tout l'art hermétique"...
Le recueil en question inclut également d'autres ouvrages, extraits d'ouvrages, ou articles, dûs notamment à Crasselame, Dee, Lambspring, Tschoudy...
Il a appartenu à Jules Boucher, qui du vivant de Julien en fut proche, et comporte d'ailleurs deux de ses ex-libris déjà connus, ainsi qu'un troisième qui ne l'était pas et qui figure ci-dessus.
Le même Boucher (Herjus Le Bouc), dont notre compère Jean Artero a déjà produit un spécimen de l'écriture (cf. son Julien Champagne, paru au Mercure Dauphinois en 2014), a en outre copié de sa main certaines pièces ou parties de pièces du recueil.
Il en est ainsi, en particulier, d'une traduction de l'ode italienne extraite de l'essai classique et au demeurant célèbre de Crasselame (Lux obnubilata), comme nous pouvons le vérifier à notre tour.
Autre Italien de naissance, Manzolli (Palingenius), a inclus dans son Zodiaque de la Vie Humaine (1733), un traité alchimique moins référencé que d'autres et dont on peut considérer l'auteur comme incertain: Science écrite de tout l'Art Hermétique" (1731).
Le tout a été traduit en français par un certain J.B.C. de la Monnerie, et comme vous le verrez ci-après, Julien Champagne a choisi de commenter ce dernier essai en usant de marginalia.
Annotations non moins substantielles que le texte dont l'importance est ainsi soulignée in fine, et sur lesquels (texte et notes) nous savons pour y avoir contribué qu'Artero a pu récemment réaliser une étude qui va bientôt, espérons-le en tout cas, trouver un éditeur.
Pour vous donner enfin une idée de la richesse de l'essai initial et de celle des ajouts de Champagne, je voudrais conclure ce petit article par ces quelques mots de début que Jean a bien voulu confier à notre sagacité:
Science écrite: L'ALCHIMIE est une étude, qui imite la nature et va beaucoup plus loin que cette servante de la Divinité.
Champagne, en vis-à-vis: L'Alchimie imite la Nature dans ses lois physiques générales, mais elle utilise surtout l'observation des réactions et phénomènes spéciaux au règne minéral. C'est ce que les Philosophes entendent lorsqu'ils disent qu'un enfant naît et se développe d'une manière, et un métal ou un minéral d'une autre.
Bonne année, chers amis et chères amies. Espérons que 2021 nous sera plus propice que l'an vieux qui vient de s'achever, et que la pandémie qui perdure hélas aura marqué d'un sceau assez sinistre, il faut bien le reconnaître.
D'un autre côté, s'agissant de nos modestes contributions sur ce site (plus de 300 articles), nous devons avouer que nous sommes heureux et fiers, après quinze années de loyaux services, de vous voir toujours plus nombreux à nous suivre.
Nous venons de franchir la barre des 400.000 visiteurs uniques, comme on dit dans le jargon, et en un sens c'est bien vrai: vous êtes, nous sommes uniques. Merci à toutes et tous de votre intérêt soutenu, et pour un certain nombre de votre participation active.
L'un de vous m'a demandé récemment pourquoi je ne m'étais pas manifesté depuis plusieurs mois, et si je comptais publier à nouveau dans ce blog, et je lui ai répondu que je le ferai bien entendu à la première occasion, dès lors qu'il y aurait justement du neuf dans notre domaine de prédilection.
Et bien voilà, le neuf est là avec le Nouvel an et entre nous la Sainte Roseline également.
Nous avons donc pris connaissance ces jours-ci, avec un intérêt certain, d'un petit fascicule que Jacques Grimault vient (à l'été 2020, croyons-nous) de consacrer à Fulcanelli et partiellement à notre cher Julien Champagne.
On ne présente plus celui que nous appellerons amicalement pour le coup maître Jacques, ancien président de l'association Atlantis qui anime désormais La Nouvelle Atlantide et sa maison d'édition du même nom.
Précisons qu'en tant qu'éditeur il a d'ailleurs publié nombre d'ouvrages d'hermétisme et d'alchimie, classiques ou contemporains. Citons, à titre d'exemple et parmi ces derniers, Table ronde, Graal et Alchimie d'Eddy Dasko, et Introduction à la Cabale hermétique d'Antoine Plussihem, tous deux parus en 2016.
Mais bien sûr c'est pour l'instant le livret de Grimault lui-même, qu'il a intitulé tout simplement Autobiographie de Fulcanelli, qui va nous occuper brièvement dans un premier temps.
La construction en est habile, puisque l'auteur ne nomme pas le scripteur supposé, dont nos lecteurs et lectrices ne peuvent ignorer cependant que selon notre scénariste il s'agit forcément d'Albert Cochon de Lapparent (cf. sur ce point le Fulcanelliana de Jean Artero, Arqa, 2017).
Notre compère Artero qu'au demeurant Grimault ne se fait pas faute de mentionner, ce qui ne peut évidemment que nous faire un plaisir extrême, comme dit certain conteur.
Autre bonne surprise: l'auteur n'ignore aucunement "Hubert": pour lui, ce dernier fut non seulement l'illustrateur de Fulcanelli, mais le double (sic) d'icelui. Champagne le (non pas un, le) double de l'auteur du Mystère et de Demeures? On aimerait beaucoup en savoir plus.
Après, avouons que nous ne savons trop que penser de l'échantillon reproduit ci-dessus de ce que Jacques présente comme un spécimen de "l'écriture à la plume du 'vrai' Fulcanelli, dans l'original du texte du Mystère des Cathédrales". En effet, il s'agit là d'un extrait identique à celui que nous avons reproduit en 2016 dans notre article intitulé Champagne et l'anonyme fulcanellien.
Enfin pour notre part nous hésitons fortement, à l'inverse, à considérer comme identiques entre elles l'écriture de l'extrait en question et celle, reproduite ci-après, de Cochon de Lapparent.
Un bonheur n'arrive jamais seul, paraît-il. Nous venons aussi d'apprendre la reparution prochaine aux éditions Les Trois R des Matériaux cryptographiques de Claude Sosthène Grasset d'Orcet (lui aussi proche de Fulcanelli).
Nous devons cette nouvelle bonne action à un autre de nos amis, Bernard Allieu, qui nous propose donc de souscrire à cette troisième édition, revue et augmentée.
La souscription proposée aux deux premiers volumes est sur le point de se terminer, donc hâtons-nous d'en profiter:
Les Trois R, au passage, semblent aussi annoncer la publication prochaine d'un troisième tome, ce qui là encore ne peut que nous réjouir. Oui, au gui l'an neuf!
C'est avec grand plaisir que nous avons pris connaissance il y a quelques jours maintenant de la dernière livraison en date de la revue régionale forézienne Regards du Pilat, animée par Thierry Rollat.
Elle contient en particulier un petit texte de Jean Artero résumant le fruit de ses recherches sur l'alchimie contemporaine, et notamment autour de Fulcanelli et (tout spécialement) Champagne:
Comme il nous en a donné l'autorisation, nous voudrions en profiter, au seuil de l'été, pour vous livrer l'intégralité de son propos, qui nous a paru avoir le mérite à la fois de la clarté et de l'actualité. Le voici donc, à l'encre violette, comme il se doit:
Quand on pense au plus grand alchimiste contemporain, il est difficile de ne pas évoquer le nom de Fulcanelli, dont l’identité civile reste à mon sens incertaine à ce jour.
Cet Adepte probablement français d’origine s’inscrit de ce point de vue dans une tradition d’anonymat que Basile Valentin, ou Irénée Philalèthe, par exemple, ont illustré avant lui.
C’est donc au travers de son œuvre écrite (Le Mystère des Cathédrales, puis Les DemeuresPhilosophales) parue entre les deux guerres mondiales qu’il convient avant tout de chercher à apprécier le rôle qu’il a pu jouer du point de vue de la postérité.
Précisons ici, d’emblée, que ses deux ouvrages ont connu assez rapidement un succès qui ne se dément pas, et ce en dépit de leur austérité apparente. En France même, les rééditions se sont succédées et se succèdent toujours, et cet opus a été traduit dans les principales langues occidentales (ainsi qu’en japonais).
C’est à Eugène Canseliet (1899-1982) que l’on doit en partie l’aura qui est celle de Fulcanelli, en raison de la promotion inlassable qu’il a faite, presque ab initio, des écrits de celui qu’il a volontiers présenté comme son Maître en alchimie.
Il y a quelques années encore, au contraire, le rôle qu’a pu jouer dans ce domaine un Julien Champagne, pourtant illustrateur du Mystère comme des Demeures, n’apparaissait pas clairement.
Ceci était d’autant plus frappant que Canseliet lui-même nous rapporte que lorsque, encore adolescent, au début de la première guerre mondiale, il rencontra Fulcanelli pour la première fois, Champagne se tenait auprès de ce dernier.
Mais il est vrai que Champagne une fois disparu (presque en même temps que Fulcanellli et en tout cas peu après la publication des deux volumes déjà mentionnés), Eugène restait à peu près seul dépositaire du legs spirituel, intellectuel et matériel en question, et devait en tout cas seul brandir, selon ses propres termes « l’étendard rouge de l’alchimie » traditionnelle.
Qui plus est, pour des raisons techniques, nous a-t-on aimablement expliqué de bonne source, les dessins de Champagne pour l’opus fulcanellien disparurent progressivement des éditions nationales, et furent remplacées par des photographies (excellentes, il est vrai). Son nom même disparut à son tour des couvertures et des pages de garde…
Tout ceci explique finalement qu’un « fulcanelliste » distingué en vint à exprimer cette opinion que de Julien on ne savait pas grand-chose, voire quasiment rien, alors qu’à l’époque, l’intérêt pour Eugène et son Maître battait déjà son plein.
C’est précisément cet intérêt d’une part, et de l’autre cette méconnaissance quasi-totale de Champagne, qui nous ont incités, Archer et moi, à créer en 2006 un blog qui lui est consacré pour l’essentiel :
Une petite quinzaine d’années et un peu plus de trois cent articles plus tard, quel bilan global tirer de cette aventure ?
Et bien force est d’abord de constater que c’est elle qui a conduit votre serviteur à entrer en écriture ; mentionnons rapidement ici Présence de Fulcanelli (Arqa de Thierry Garnier, 2008), et plus récemment sur l’ensemble des « fulcanellistes » et autres « fulcanellisables », Fulcanelliana (Arqa toujours, 2017).
Mais bien entendu, pour ce qui nous occupe aujourd’hui, notre petit essai sur Julien Champagne Apôtre de la Science Hermétique (Le Mercure Dauphinois de Geneviève Dubois, 2014) est à notre sens le plus significatif.
Soit me direz-vous, mais venez-en au fait : Que savons-nous de plus sur cet « excellent artiste », Canseliet dixit ?
D’abord, répondrai-je, que son intérêt ne se limite certainement pas à l’hermétisme. Elève de Léon Gérôme à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris, Julien est un peintre et dessinateur coté, qui figure au Bénézit, la « bible » internationale en la matière.
Et que certaines de ses œuvres picturales connues n’ont rien à voir à l’évidence, ni avec l’alchimie, ni avec l’opus fulcanellien.
A l’inverse, nous le voyons dès 1910 occupé à illustrer ce dernier, bien avant parution par conséquent. C’est cette année-là, également, qu’il peint son célèbre tableau du Vaisseau du Grand Œuvre, qu’il offrira à son jeune ami Eugène, et que ce dernier reproduira dans ses Deux Logis Alchimiques (Pauvert, 1979).
Il est donc plus que vraisemblable qu’à ce moment il connaissait déjà Fulcanelli, sachant que ce dernier ne peut être ni Champagne, ni Canseliet, compte tenu de leurs âges respectifs et de leur bagage intellectuel de l’époque. Mais nous reviendrons ultérieurement sur ce point particulier.
En fait, nous savons maintenant que l’intérêt de Julien pour l’alchimie est malgré tout antérieur à cette époque, puisque dès 1908 il est suffisamment instruit dans ce domaine pour commettre un petit essai d’alchimie théorique, La Vie Minérale, au sous-titre si fulcanellien : Etude de Philosophie Hermétique et d’Esotérisme Alchimique.
Conservé par sa famille, son manuscrit sera, grâce à Bernard Allieu, publié un siècle plus tard (Les Trois R, 2011, et seconde édition, 2015).
Les Trois R nous ont également gratifiés, en 2015 encore, de la publication d’un autre manuscrit de Champagne, le Procédé de Mr Yardley, toujours de provenance familiale. Cette fois il ne s’agit pas d’une œuvre de Julien stricto sensu mais de la présentation et de la traduction par ses soins en 1913 d’un traité d’alchimie pratique d’origine britannique, attribuable à un certain Frederick Hockley (Yardley et Hockley seront mentionnés par Fulcanelli).
Allieu en proposera en 2016 une version anglaise. L’intérêt de cette plaquette réside dans le fait qu’on y a certes affaire à une sorte de (procédé) particulier, de l’ordre de la spagyrie, mais que parallèlement, comme souvent ou parfois, on ne s’y trouve guère éloigné du cheminement au laboratoire, d’un Philalèthe dans ce cas précis.
Ce qui évidemment n’a pas échappé à Champagne, lequel s’était donc, dès avant la première guerre mondiale, lancé dans des expérimentations.
Sommes-nous désormais au bout de nos découvertes sur Julien ? Il nous semble bien que non. C’est ainsi, notamment, que nous sommes toujours à la recherche de deux autres de ses écrits, dont l’existence dans un fonds du magiste Jules Boucher, qui fut un temps un proche de Champagne, nous paraît avérée, même si la trace s’en est perdue pour l’instant : un Dictionnaire Hermétique et une étude sur Le Symbolisme Alchimique.
Pour en terminer provisoirement, revenons à présent sur mon assertion antérieure selon laquelle ni Champagne ni Canseliet ne sont Fulcanelli.
Je la maintiens, même si ce sont tous deux des Fulcanelli. En effet, tous deux ont contribué à l’élaboration du Mystère et des Demeures. Pour Canseliet, c’est bien connu, il les a mis en forme. Pour Champagne, çà l’est moins, et pourtant nous avons pu établir -au-delà de son rôle d’illustrateur- qu’il s’était (par exemple) intéressé de près à certain monument hermétique écossais (le cadran solaire d’Holyrood) bien avant la publication de l’opus fulcanellien, et dans des termes très voisins de ceux de Fulcanelli.
A l’inverse, il est généralement su que Julien a parfois dédicacé le Mystère ou les Demeures en signant d’un AHS Fulcanelli (un « fulcanelliste » a émis l’hypothèse qu’il faut lire cette mention ainsi : Apôtre de la Science Hermétique de Fulcanelli). Eugène de son côté a , lors de son admission à la Société des Gens de Lettres, demandé à ce qu’on le reconnaisse comme Fulcanelli pour les ouvrages en question…
Mais voilà, je le répète, ni l’un ni l’autre n’avaient pu avoir acquis, avant 1914, une culture scientifique, littéraire et historique suffisante pour avoir élaboré seuls ces deux livres magistraux.
Donc à côté ou derrière, ou au-dessus d’eux, se tenait et se tient peut-être toujours le « vrai », le grand Fulcanelli.
Alors qui ? Un Dujols ou un proche des Dujols ? Un Lesseps ou un proche des Lesseps ? Un membre avéré ou caché d’une de ces familles, ou des deux ? Mystère. Et mystère louable, au regard de la tradition alchimique, puisqu’il permet à la fois de magnifier l’aura fulcanellienne, et de se concentrer sur ce que l’Adepte Fulcanelli nous a légué de plus précieux : son œuvre.
Sur ce dernier aspect des choses, je ne peux que vous recommander, chers lecteurs et chères lectrices, de visionner un échange de 2018 autour de Fulcanelli, auquel a avec bonheur participé votre humble serviteur : croyez-m’en, il est très riche.
Last but not least, si vous voulez à nouveau pouvoir consulter Mystère et Demeures en bénéficiant de l’apport inestimable des illustrations de Julien Champagne, c’est désormais chose possible et même aisée, grâce cette fois à Gilbert Bonnet.
Ses éditions Alcor les ont en effet republiés, et de bien belle façon, en 2013.
Valete !
Qu'il nous soit également permis de louer ici le travail accompli par Thierry Rollat et son équipe, puisque cette revue gratuite, majoritairement consacrée à notre cher Forez, dont le massif du Pilat a été érigé en parc naturel régional, accorde aussi une place non négligeable (certains regards, donc) à l'ésotérisme en général.
C'est ainsi qu'elle comporte entre autres une rubrique sur l'alchimie:
Cette rubrique, alimentée notamment par un certain Renard Gambline, qui abrite désormais également l'article ci-dessus de l'ami Artero. Bravo, Thierry, et tous et toutes.
Hier Jean Artero et moi avons eu l'opportunité de nous rendre au cimetière d'Arnouville en bonne compagnie.
Nous avons ainsi pu constater que la tombe de Champagne qui s'y trouve et qui a été récemment restaurée grâce à un bel effort collectif (cf. notre article de 2017: Arnouville de Julien Champagne) se trouve toujours dans un état très satisfaisant dans l'ensemble.
Nous avons pu également nous entretenir avec le gardien des lieux, homme travailleur et sympathique qui était justement en train de s'activer dans la place au moment de notre visite.
A notre demande, il a ainsi pu nous confirmer aimablement qu'il n'était pas rare que Julien reçoive des visiteurs, ce qui est bien réconfortant.
Enfin, comme nous avions entendu dire qu'au moins une tombe du cimetière était réservée à un ou une Bergeron, nous nous sommes enquis de l'existence d'une telle sépulture.
En effet (cf. notre article de 2011 Julien Champagne testamentaire), "Hubert" avait couché sur son testament une dame Bergeron qui l'avait soigné pendant sa maladie (hélas finale).
La coïncidence était donc frappante. Coïncidence supplémentaire, une tombe située à proximité (concession D46/P) de celle de Julien abrite les restes d'un couple dont le patronyme est bien Bergeron. En fait elle se situe même juste à côté de celle de Champagne.
Nous avons pu obtenir sur place quelques précisions à leur sujet: Il s'agit de Mme Bergeron Berthe Benjamine, née Pascal, dont on ne connaît pas l'année du décès, et de M. Charles Jean-Baptiste Bergeron, mort la même année que Julien, en 1932.
Pour l'anecdote, au cimetière d'Arnouville repose également un autre Bergeron, Jean-Claude (ou Jean Claude), décédé lui bien plus récemment (2018): La concession est cette fois répertoriée F464/30.
Pour autant, rappelons-nous que Julien Champagne est décédé à Paris, que donc la dame Bergeron qui a pris soin de lui à la fin de sa vie terrestre n'a pu le faire que dans la capitale, et que rien ne prouve par conséquent, à première vue, que nous ne soyons pas là en face d'un extraordinaire hasard, et donc d'une pure homonymie.
Cependant un ami nous a fait remarquer que si l'on en croit le témoignage de Raymond Fusilier dans la revue L'Initiation (première livraison de 2012, article intitulé Fulcanelli), il pourrait bien s'agir de la bonne personne, et plus généralement des bonnes personnes:
Selon Raymond, pages 27 & 28 du numéro en question, Charles "Jean-Bastide" Bergeron habitait bien à côté de Champagne rue Rochechouart, sur le même palier. dans une chambre jouxtant le domicile de ce dernier. Il serait bien mort en 1932 lui aussi, à Arnouville, le 24 octobre exactement, date qui correspond bien à celle enregistrée au cimetière.
Et Fusilier de préciser à propos de Charles et Julien: "Leurs tombes sont dans le même cimetière, l'une à côté de l'autre."
Il semble donc très possible, voire probable, que Berthe Benjamine Bergeron, née Pascal soit la dame Bergeron que Julien Champagne a fait bénéficier de ses dernières volontés.
Chers amis et amies, en ces temps difficiles de pandémie, je voudrais d'abord partager avec vous une pensée pour tous ces malades, leurs proches, et tous ceux qui luttent pour préserver le maximum possible de vies.
En alchimie, la prière est sans doute capitale, elle est première et nos petits travaux subséquents de chercheurs (et d'auteurs) peuvent actuellement paraître parfois bien dérisoires.
D'un autre côté, je me réjouis avec vous quand j'apprends de ci, de là, que tel(le) libraire, tel(le) éditeur restent malgré tout bien actifs dans notre domaine de prédilection, l'ésotérisme et bien sûr surtout l'hermétisme.
C'est ainsi aussi, dans l'action continuée des uns et des autres que nous pouvons engranger cet espoir dont le monde a tant besoin actuellement.
Et donc je viens d'apprendre avec bonheur que notre ami portugais Walter Grosse vient le mois dernier de faire paraître au Mercure Dauphinois de Geneviève Dubois un nouveau petit livre consacré à Fulcanelli: Fulcanelli, Les zones d'ombre enfin éclaircies (2020).
Sans doute vous souvenez-vous, pour certains d'entre vous au moins, de son premier ouvrage sur le sujet: Le Puzzle Fulcanelli, aux éditions La Pierre Philosophale de Serge Goasguen, en 2011.
Il vient donc maintenant tout simplement, en une centaine de pages bien senties, autant le dire d'emblée, actualiser et préciser son point de vue sur l'identité de l'Adepte.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, si j'ose m'exprimer ainsi, je m'en voudrais de ne pas en profiter pour vous signaler que sa passion alchimique s'étend aussi à un autre alchimiste célèbre, Nicolas Flamel, auquel il a en 2018 consacré un essai, en langue lusitanienne, cette fois: O vencedor da pedra pelo fogo (Manufactura).
Pour lui, si j'ai bien compris, Flamel est comme Fulcanelli un Philosophe par le Feu, dont l'identité civile serait restée cachée. Intéressante hypothèse, s'agissant de celle là encore d'un nomen mysticum, et j'ai hâte de pouvoir me faire une meilleure idée de sa démonstration sur ce point précis, notamment.
Sauf erreur de ma part, le nouveau livre de Grosse sur Fulcanelli est en fait une sorte de francisation d'une édition précédente (mais toujours dans notre langue), parue en Belgique chez Shop My Books en 2019, mais ceci est naturellement plutôt anecdotique.
Tout aussi naturellement, Walter maintient en 2020 comme en 2019 sa vision initiale de "l'énigme Fulcanelli": le Maître de Julien Champagne et d'Eugène Canseliet, l'auteur du Mystère des Cathédrales et des Demeures Philosophales n'est autre que Paul Decoeur, (1839-1923), un savant ingénieur qui reste connu quoique de renommée moyenne.
Vous vous souvenez peut-être aussi que Grosse est quelque part l'initiateur de cette thèse, qui lui a valu le titre envié qui lui a parfois été décerné de "Champollion des études fulcanelliennes", avant d'être rejoint sur ce terrain par un autre de nos amis belges, un certain Filostène, lequel semble depuis quelque temps avoir choisi d'autres centres d'intérêt, notamment en astrologie.
C'est d'ailleurs un des points forts que je veux souligner maintenant du nouveau travail de Grosse; contrairement à d'autres, il ne feint pas d'ignorer les recherches de ses collègues, il les référence (belle bibliographie, au passage), il les cite, il les loue, ou les critique, mais on est là dans une démarche qui est à l'évidence sérieuse et cela mérite d'être mis en valeur.
Encore plus rare, pour prendre un exemple, il rejette certaines idées de notre complice Jean Artero, mais il en approuve d'autres. Exceptionnel même, il reconnaît à l'occasion avoir commis telle ou telle erreur (de détail, on s'en doute).
Une autre grande qualité que Walter Grosse manifeste ici est à mon sens que son livre répond exactement à son objet: sa structure est admirable de ce point de vue, la chronologie y est maîtresse, car il a bien compris que certaines dates sont incontournables dans ce dossier compliqué.
Et c'est à partir de ce moment, hélas que le bât blesse un tantinet. Decoeur est décédé en 1923, et selon Canseliet il a assisté en 1924 aux obsèques d'Anatole France avec Fulcanelli? Pour Walter c'est que Canseliet a menti par omission; il aurait dû préciser que Fulcanelli y était présent...par la pensée.
On aimerait d'ailleurs en savoir plus sur l'idée de Grosse que France aurait participé à l'élaboration de l'opus fulcanellien, mais poursuivons notre relevé chronologique, sans vouloir être complet, mais uniquement pour donner une idée de la façon dont Walter appréhende son affaire.
Qui a relu les projets d'édition des deux livres publiés de Fulcanelli, puisque Canseliet explique en avoir fait approuver la rédaction par Fulcanelli avant leur publication en 1926 et 1930 respectivement? Pour Walter Grosse, ce n'est pas Decoeur, bien sûr, ni même le beau-frère de Julien Champagne, Gaston Devaux, qui aurait pu servir d'intermédiaire sur ce point, non, ce serait un exécuteur testamentaire qu'il ne nomme pas mais qui pour lui n'est manifestement pas Eugène Canseliet.
Qui dit exécuteur testamentaire dit testament, mais si notre estimable fulcanelliste en affirme l'existence, c'est sans autre précision, là encore.
On l'aura compris, si une fois de plus des documents sont produits, et cela aussi est à mettre au crédit de Walter, aucun n'est de nature à prouver l'identité Fulcanelli-Decoeur. Au contraire, nous pouvons relever des interprétations surprenantes: Fulcanelli, dixit, Canseliet, n'aimait pas écrire, et Decoeur n'a semble-t-il pratiquement pas publié, donc...
Mais ce qui m'a un peu chagriné dans cette démarche dont on peut par ailleurs estimer la constance, c'est la persistance avec laquelle Grosse met en doute la parole d'Eugène. Il n'hésite pas à produire, même, un courrier de François Beauvy (un biographe de Philéas Lebesgue, ce dernier étant un proche de Canseliet) où Beauvy traite Eugène Canseliet d'affabulateur.
A l'inverse, Walter Grosse semble accorder crédit à l'opinion du Britannique Kenneth Rayner Johnson, selon lequel si Canseliet a bien revu Fulcanelli en Espagne alors que l'Adepte avait 113 ans et que pour certains l'Adepte se serait manifesté à lui sous une apparence féminine, c'est peut-être qu'il était un travesti...
Plus sérieusement, plus gravement même, il m'a semblé après avoir lu et relu ce beau travail que notre Walter a une difficulté qu'il a du mal à surmonter avec la notion de survie possible de l'Adepte.
Pour lui, Decoeur-Fulcanelli est mort en 1923, donc Canseliet n'a pu le revoir une trentaine d'années plus tard à Séville.
Il emploie parfois l'expression L'Autre Monde, mais l'impression qu'on a en le lisant c'est que pour lui cet Autre Monde cher notamment à de Cyrano Bergerac n'est pas réel; en fait il l'écrit: c'est un mythe.
Donc on me semble assez loin avec tout cela de la conception fulcanellienne de l'alchimie. Je recommande par conséquent plutôt la lecture ce brillant essai aux amateurs déjà bien au fait du "dossier Fulcanelli". Pour les autres, probablement faudrait-il plutôt commencer par le Fulcanelliana de Jean Artero (éditions Arqa de Thierry Emmanuel Garnier, 2017), pour disposer d'entrée de jeu d'une vue d'ensemble de la question fondamentale qui nous est posée :
Et sur ce dossier et en particulier sur la notion d'Adeptat, mais aussi sur le merveilleux de l'alchimie et la tradition alchimique en général, je me permets de vous recommander aussi, avant de vous quitter pour cette fois, un petit entretien d'une paire d'heures réalisé en 2018 grâce notamment à feu Christophe de Cène, Bernard Renaud de la Faverie, Jean-Claude Pascal et Fabrice Milocheau. Disparu un temps de Youtube, après 14000 vues tout de même, il vient de réapparaître:
Il y a quelques années déjà, nous avions souligné certaines accointances entre Julien Champagne et le libraire et éditeur Emile Nourry, désormais plus connu du vulgum pecus comme folkloriste sous son pseudonyme de Pierre Saintyves:
Ayant eu récemment la bonne fortune d'acquérir un catalogue de sa "librairie ancienne et moderne", paru en 1931, nous pouvons et même devons y revenir, car cette fois il mentionne Champagne non seulement à propos du Mystère des Cathédrales de Fulcanelli (1926), mais aussi des Demeures Philosophales de ce dernier (1930).
Dans les deux cas, Nourry ne se fait pas faute de louer Julien, comme artiste d'une part, et comme hermétiste de l'autre.
En outre, en qualifiant fort justement Fulcanelli de "philosophe par le feu", Emile nous donne à nouveau à penser que de son côté également l'hermétisme et même l'alchimie ont pu nourrir son intellect.
Mais la surprise de ce beau catalogue vient avant tout, finalement, du fait que l'érudit libraire nous y apprend qu'en 1931 l'édition originale du Mystère des Cathédrales était déjà épuisée.
Comme à notre avis cette mention ne peut être erronée, elle nous conduit à rectifier ce que nous croyions acquis jusqu'alors. Si les Demeures Philosophales originelles étaient encore disponibles en 1945 (semble-t-il), il n'en était donc sûrement pas de même de l'ouvrage qui les a précédées.
Sic transit gloria mundi. La librairie parisienne d'Emile Nourry a fait place à une agence de voyages, dont il est cependant curieux de constater qu'on y est sensible à la notion d'aventure, ce qui lui aurait peut-être plu, et qui en tout cas n'est pas pour nous déplaire.
Quant à lui, si son nomen n'est plus connu désormais que des happy few stendhaliens, dont vous et nous osons nous flatter de faire partie, Pierre Saintyves continue de vivre une bien belle vie, ainsi qu'en témoigne cette parution de 1987, dans la collection Bouquins de Robert Laffont.
Comme Fulcanelli et Nourry notamment, Saintyves a bien su déceler, notamment dans les contes d'un certain Charles Perrault et d'autres "récits parallèles", un ésotérisme du meilleur aloi.
Chers tous et chères toutes, figurez-vous que le mois dernier, en ces temps de Brexit, Julien Champagne a eu les honneurs d'un magazine britannique, éminemment britannique même (so British, by the way): The Aviation Historian, numéro de revue dont vous pourrez si le souhaitez acquérir un exemplaire (ou pourquoi pas après tout, plusieurs):
L'article précis dont il s'agit est rédigé en anglais (sorry for that) par un historien de l'aéronautique, qui est bien français, à l'inverse: Jean-Christophe Carbonel.
Si j'ai bien compris, il s'agit là de la première d'une série de portraits de pionniers...français de l'aviation (incredible, but true), avec pour modèle, en quelque sorte, un certain Antoine Padoue Filippi.
Filippi qui est de nos jours, reconnaissons-le, un illustre inconnu, sur lequel, malgré la notice ci-dessus (qui n'est pas dans l'article de Carbonel) nous savons peu de chose. Mais me dire-vous, et Julien Champagne dans tout çà? Bon sang, mais c'est bien sûr, 1912, on est pile poil à l'époque du fameux traîneau à hélice (dit aussi Ailonive).
Voici donc de nouveau (nous connaissons déjà ce cliché, mais pas son sous-titre) Champagne en compagnie d'Henri Steineur, le mécanicien de Bertrand de Lesseps.
Jean-Christophe nous révèle au passage que c'est ce dernier qui a conçu les stries que l'on voit sur l'hélice, dénommée apparemment Cyrnos.
Et puis il nous offre un autre cliché, nouveau cette fois, du même Bertrand, toujours avec en 1912 la version à roues du traîneau (je crois reconnaître Henri près du volant).
Cette même année, Filippi aurait été présenté lors d'une exposition au président français Armand Fallières et au grand-duc russe Alexandre, beau-frère de Nicolas II...
Et puis, exit Filippi, il semble, jusqu'en 1926 (année de parution du premier livre de Fulcanelli).
C'est cette fois l'année où un brevet est déposé à son nom, pour un rotor qui ressemble bougrement à celui d'un hélicoptère.
En ces temps d'Epiphanie, que diriez-vous d'un peu de cidre ou plutôt de Champagne? Si vous en êtes d'accord, je vous propose de profiter ensemble de la dernière livraison (fin 2019) de l'excellente revue Liber, publiée sous les heureux auspices des éditions Alcor, de notre cher Gilbert Bonnet.
De ce numéro très riche en articles aussi passionnants les uns que les autres, nous voudrions retenir avec vous, principalement, celui que Gauthier Pierozak y a consacré au "mystère Fulcanelli à travers la correspondance de René Guénon".
Et certes son rédacteur n'est pas pour nous un inconnu total. Nous savions déjà son intérêt, non seulement pour Guénon, mais aussi pour Charbonneau-Lassay et Grasset d'Orcet, notamment au travers de la revue La Règle d'Abraham:
Toujours est-il que ce nouvel écrit guénonien, ou si l'on veut fulcanellien, nous a d'autant plus interpellé que nous avions il n'y a guère consacré à l'antagonisme (et à la parenté) entre Fulcanelli et Guénon un petit écrit qui a semble-t-il rencontré et semble-t-il continue de rencontrer un certain écho:
Notre modeste contribution était alors relative à la période 1948-1949 et se concentrait sur des personnalités comme Bastien, Boucher ou Faugeron, comme interlocuteurs ou références de Guénon dans son approche obstinée, ou du moins tentative d'approche, de l'opus et de la personnalité de l'auteur du Mystère des Cathédrales et des Demeures Philosophales.
Obstinée certes, car l'étude fouillée de Pierozak nous permet d'élargir le spectre dans ce domaine.
Sans vouloir être complets, je vous propose de nous intéresser à Julien Champagne (évidemment) et c'est ainsi que nous voyons apparaître, dès 1934:
- un certain Patrice Genty (lettre à Guénon),
"Quant à Canseliet, je ne sais rien sur lui. Certains l'identifient au peintre Champagne, d'autres non. Lequel des deux est Fulcanelli? Celui-ci serait Dujols d'après d'autres. Tout cela est mystérieux."
- un certain Marcel Clavelle (Jean Reyor, dixit Canseliet),
"Je vous ai dit que j'essaierais d'obtenir des renseignements sur les "Frères d'Héliopolis"... C'est Canseliet et Champagne (qui décidément n'a pas l'air d'être mort) qui seraient à la tête de l'organisation."
En 1936 encore, Guénon essaiera de faire le point à ce sujet (lettre à Genty):
"Le véritable Fulcanelli ne serait pas Champagne, mais que sait-on au juste de celui-ci? Je n'ai jamais rien entendu de précis sur lui, si ce n'est qu'il était peintre, et je ne sais même pas s'il vit encore."
Mais nous ne voulons ni ne pouvons ici révéler la totalité des informations dispensées par Gauthier Pierozak dans Liber, le mieux serait sans doute de vous y reporter directement.
Signalons pour terminer que Gilbert Bonnet vient de commettre une autre bonne action, en rééditant le superbe essai d'Albert Poisson sur la théorie alchimique, dont la lecture reste à notre humble avis indispensable aux "amateurs de Science."
Et puis, bien entendu, et last but not least si Dios quiere, excellente année, chers amis et amies!
Voici quelque temps déjà, notre ami José Rodriguez Guerrero, de l'excellente revue espagnole d'études alchimiques AZOGUE, nous a fait part de sa découverte concernant une oeuvre de jeunesse de Julien Champagne, "un tableau intitulé Vallée de Croisette à Frohen-le-Grand. Il a été livré par le peintre à Emile Delignières (1836-1910), pour une exposition organisée en juillet 1897 au musée d'Abbeville et du Ponthieu à l'hôtel d'Emonville. Il est possible qu'il soit actuellement conservé au musée Boucher-de-Perthes de cette cité."
Et José d'insister, en précisant et référençant aussitôt son propos: Emile Delignières, Exposition d'oeuvres d'art et de curiosités à Abbeville, Fourdrinier, Abbeville, 1897, page 36:
"Voici l'oeuvre d'un tout jeune, mais d'un vaillant et d'un laborieux, profondément épris de la nature et de l'art: il est entré dans la carrière par la bonne porte de l'Ecole des Beaux-Arts et il y est l'élève de M. Gérôme; c'est M. Julien Champagne, originaire pas sa famille de Béalcourt, à quelques lieues d'Abbeville: la Vallée de Croisette à Frohen-le-Grand (Somme), n° 288 (H. 0m71, L. 1m), était la première oeuvre exposée par lui, et nous avons été heureux, ayant déjà remarqué ses études, de la faire recevoir à l'Exposition, en donnant ainsi droit de cité à l'auteur:
On est au milieu de l'été, les blés sont mûrs, le ciel est illuminé tout à l'horizon des derniers reflets du soleil couchant, mais l'orage menace, les nuages noirs, lourds et vastes se pressent chassés par la tempête et, par leur teinte sombre, font ressortir au loin l'éclat fulgurant du ciel qui semble tout paré de lueurs d'incendie; l'effet est saisissant, et pour être d'une certaine hardiesse, il n'en est pas moins vrai, le vallon fuit au loin dans une perspective à perte de vue; au premier plan, une terre fraîchement labourée, plus loin un champ de blé aux épis jaunissants; à gauche, une lande en pente douce et suivant la ligne de la vallée se déroule, parsemée çà et là de genêts; cette partie est particulièrement réussie, et le tableau dans son ensemble fait honneur au jeune artiste."
Naturellement, nous nous sommes empressés de remercier l'ami Rodriguez Guerrero, et avons essayé, malgré les doutes que l'on imagine, de pousser nos investigations plus avant.
Mais permettez-moi, dans un premier temps, de saisir cette opportunité de vous signaler l'intérêt d'AZOGUE:
Nous avons donc tâché de chercher des confirmations de ce qui précède auprès des musées d'Abbeville, et à notre relative surprise, elles sont arrivées relativement vite, sous la forme d'un courriel de M. Patrick Absalon, naturellement rédigé ès-qualités:
"L'oeuvre que vous cherchez n'appartient pas aux collections du musée. Elle a seulement été exposée en 1897 pour le centenaire de la Société d'Emulation d'Abbeville, apportée par le peintre lui-même; vous trouverez en pièce jointes les pages correspondantes du catalogue, ainsi que des vues de cette exposition sur le site Internet des archives d'Abbeville:
Ne manquons pas de complimenter ici M. Absalon pour sa diligence, sa compétence et son amabilité, bien dignes de ses fonctions...et de Champagne.
Voici donc, en complément des explications de M. Guerrero, celles de M. Absalon. D'abord, une vue du catalogue de l'exposition où Champagne, à peine âgé de vingt ans, fut à l'honneur pour la première fois.
Puis, la cote de l'oeuvre exposée.
S'agissant à présent des liens possibles entre Champagne et Delignières, il semble, en l'état actuel des choses, qu'il convienne de balancer entre la réputation de voisinage (Béalcourt) et celle de notoriété (Gérôme).
En effet, Delignières n'est pas un artiste, quoique féru d'art local; mais il est à l'origine de l'exposition dont il s'agit, en raison de ses fonctions même:
Exposition dont on pourra ci-après se faire une idée, à la fois de la profusion et de l'éclectisme...
Toujours est-il que le tableau exposé en 1897 par les soins de Delignières et Champagne n'est pas réapparu à ce jour, du moins à notre connaissance du moment.
Depuis lors, Frohent-le-Grand est devenu par regroupement de communes Frohent-sur-Authie.
Voici, en conséquence,le type de paysages que Julien a pu à cette époque proposer à la sagacité de ses compères "régionaux de l'étape":
Encore dirons-nous pour conclure provisoirement une oeuvre de Julien à redécouvrir! Bon Noël à chacune et à chacun.