Saint Clément nous vienne en aide, car il est temps d'approfondir quelque peu la relation nouée entre Julien Champagne et le couple Vulliaud.
"Hubert" fut-il plus proche encore de Madame que de Monsieur, comme il semble que ce fut le cas avec une autre paire d'amis, les Dujols?
A propos de ces derniers nous avons quoiqu'il en soit relevé les fait qu'ils étaient également amis des Vulliaud:
http://www.archerjulienchampagne.com/article-2491324.html
Je crois bien que c'est Geneviève Dubois qui dans son Fulcanelli dévoilé (1992) avait noté: "Le salon des Dujols est fréquenté par des personnes appartenant au monde de l'ésotérisme. Parmi elles, le kabbaliste réputé, vieux camarade de Pierre Dujols, Paul Vulliaud, dont l'intérêt pour la cabale hermétique est considérable."
Or en 1913 Julien Champagne nous révèle que Madame Vulliaud,"femme de l'occultiste bien connu", a été sollicitée par lui pour traduire de l'anglais le traité alchimique dit Manuscrit Yardley:
http://www.archerjulienchampagne.com/article-25758488.html
Dans son Esotérisme, occultisme, franc-maçonnerie et christianisme aux XIXe et XXe siècles (NEL,1981, réédition Lanore, 2008), Marie-France James a consacré une notice bio-bibliographique à Paul Vulliaud (1875-1950) où figurent plusieurs notations intéressantes, comme son inscription à l'Ecole des Beaux-Arts de Paris, ou des fréquentations comme François Jollivet-Castelot et plus tard le docteur Henri Hunwald.
Et elle ajoute: "A Paris il fait la connaissance de mademoiselle Annie O'Sullivan, d'origine irlandaise, qu'il épousera après plusieurs années de vie commune. Pour assurer leur subsistance, il est commis à la librairie Emile Nourry." James reconnaît honnêtement que ses renseignements inédits à l'époque lui ont été fournis par François Secret.
Ce dernier a lui-même, en 1987, rédigé sur Paul Vulliaud une notice encore plus étoffée, à l'occasion de la parution d'un manuscrit de ce dernier, Histoires et portraits de Rose-Croix.
Il y précise en particulier qu'Annie Vulliaud, née O'Sullivan (1879-1951) était la soeur du ténor John O'Sullivan, "tous deux venus en France avec leurs parents en 1895." Comme son mari, Annie, qui passe aussi parfois pour avoir été la fille du ténor favori de James Joyce, a longuement travaillé chez Nourry. Sa forte personnalité lui avait valu le surnom de "la Queen", Paul se contentant du titre, enviable cependant, de "Rabbin."
François se fait aussi l'écho du fait que Paul a souvent rendu un hommage public à sa femme, lui dédiant par exemple tel sénaire sur Scot Erigène: "A ma femme. Les princes de la race O'Sullivan ont peut-être entendu la voix de Scot l'Irlandais, je vous dédie amoureusement un humble écho de cette voix."
Parmi les articles peu connus de Vulliaud, Secret mentionne un Paracelse (1909), et en 1912 Quelques mots sur l'alchimie, ainsi que Le mystère satirique des cathédrales (ce dernier paru dans la Revue des nations: "R. Malye était un ami de P. Vulliaud.")
Rermerciant enfin "Jacques O'Sullivan, artiste lyrique", pour la documentation fournie, il rappelle que la riche bibliothèque de Paul a rejoint le fonds Vulliaud de l'Alliance israélite universelle.
Finalement je relève dans les notes fournies dans le même volume par Jean-Pierre Laurant que Milosz a, en 1928, dédié un article sur les chants populaires de Lithuanie "à mes chers amis Mr et Mme P. Vulliaud."
Sans doute nous faut-il noter également que Paul Vulliaud est mentionné par Eugène Canseliet dans deux de ses ouvrages:
L'Alchimie et son livre muet (1967): "C'est à Emile Nourry que nous proposâmes et que nous confiâmes en lecture au début de l'an 1925 le manuscrit du Mystère des cathédrales, auquel il préféra la dactylographie du très honnête et savant Paul Vulliaud, consacrée à Joseph de Maistre."
Deux logis alchimiques (1979): "Ce ne fut pas absolument par hasard que nous entrâmes dans la librairie de Jean Schemit, et que tout de suite nous y fûmes aussi bien accueilli. La visite nous avait été conseillée par le bibliopole Emile Nourry, qui se trouvait alors très occupé de Paul Vulliaud."
Rappelons que Canseliet ajoute aussitôt: "Or, que Jean Schemit eût connu Fulcanelli, nous en eûmes toujours le sentiment tenace et singulier dont nous ne cherchâmes jamais à recevoir l'inutile confirmation."
A propos de Canseliet justement, saluons comme il convient la parution en 2010 du second volume de la réunion de ses articles, à nouveau présentée par sa petite fille Sylvaine Canseliet.
On y trouvera nombre de textes publiés notamment en Atlantis, pas toujours accessibles aux jeunes chercheurs, et bien sûr mesdames aux jeunes chercheuses. Ces écrits toujours très riches par eux-mêmes s'adornent en outre d'un "superbe manteau" d'illustrations choisies, dont par exemple celle de la quatrième de couverture, qui nous présente une Alchimie en majesté, magnifique vitrail issu non pas de la cathédrale de Paris mais de celle de Laon.
Deux des capitales de la France se trouvent ainsi placées sous la bienveillante houlette de Notre Dame la Science, et l'on pourra également vérifier à nouveau, à cette occasion, l'unicité du symbolisme hermétique d'une basilique à l'autre, comme cela a été maintes fois souligné par Fulcanelli et son unique disciple (Sylvaine dixit) Eugène Canseliet.
Dans son Anthologie de la littérature occultiste (XIXe et XXe siècles français), qui vient de son côté d'être publiée par les éditions Delphica (L'Age d'Homme), Emmanuel Dufour-Kowalski considère pour sa part Canseliet comme "une des lumières contemporaines de l'alchimie."
Et de promettre à ses lecteurs que Julien Champagne, Eugène Canseliet mais aussi Fulcanelli ne seront pas négligés dans son ouvrage. Il me semble bien qu'il tient parole, et même qu'on y trouve nombre de protagonistes de ce blog, que je vous laisse le plaisir de découvrir ou de redécouvrir.
Enfin signalons l'apparition d'une nouvelle maison d'édition, La Pierre Philosophale, qui offre à la souscription un certain nombre de livres à paraître autour de "l'énigme Fulcanelli" et de l'alchimie:
http://lapierrephilosophale.free.fr/lapierrephilosophale/index.html
ARCHER