Emmanuel Dufour-Kowalski vient de publier en 2006 aux éditions milanaises Archè un livre consacré aux conférences de René Schwaller: La quête alchimique, dont je me permets de vous recommander la lecture, pour plusieurs raisons.
La première est naturellement que nous en apprenons un peu plus sur Schwaller, ainsi que sur ses relations connues et inconnues, des peintres Hans (Jean) Arp et Henri Matisse au poète Jean Cocteau, en passant par l'historienne Marie-Madeleine Davy.
La seconde est que l'auteur est manifestement très au fait de ce qui est advenu de l'héritage matériel de la famille Schwaller. Il n'ignore rien semble-t-il et du rôle joué par la dame de compagnie d'Isha Schwaller, Thérèse Collet, ni des diverses péripéties liées à la création de l'association Bozawola, exécuteur testamentaire de Lucie Lamy, la belle fille de Schwaller, de même qu'Olivier Robichon et son frère en furent les légataires universels.
Enfin, Kowalski s'explique sur la constitution des archives Ta-Meri (terre aimant du ciel), du nom du dernier groupe fondé par les Schwaller, archives à lui léguées de son vivant par Olivier Robichon, et qu'il anime désormais.
A la lecture de cet imboglio de la fin du groupe de Louxor, on comprend mieux l'étrange silence de la fondation Pierre de Coubertin, supposée détentrice d'un "fonds Lucy Lamy", dès lors qu'elle elle l'objet sur ce point de sollicitations privées.
Sur tous ces points, vous voudrez bien vous reporter à mes posts précédents, tels que: Julien Champagne et Lucie Lamy (21 août 2006), et André Vandenbroeck gomme Champagne (29 août 2006):
http://www.archerjulienchampagne.com/article-3603422.html
http://www.archerjulienchampagne.com/article-3672613.html
Qualifiant Schwaller et Champagne de lucifériens, ce qui me paraît pouvoir prêter à confusion, Dufour est également disert sur le groupe du Grand Lunaire, que nous avons déjà rencontré:
http://www.archerjulienchampagne.com/article-3112353.html
Il estime visiblement que l'influence sur ce groupe auquel aurait appartenu Champagne de l'oeuvre de la baronne Elisa Lotus de Païni, auteur des Trois totémisations publiées par Chacornac en 1924, ne doit pas être sous-estimée.
Selon EDK, ce Lunaire qu'il appelle Grand ou Très Haut, fut composé en partie par le cénacle de Schwaller à sa villa Hiéra de Saint-Rémy-lès-Chevreuse, et il cite parmi les membres du groupe
Julien Champagne, Jules Boucher et Alexandre Rouhier.
J'ai également trouvé très révélateurs les passages de cet ouvrage où Emmanuel confirme notre intuition sur les rapports entre la pensée de Dina et le cercle fulcanellien auquel participèrent Schwaller et Champagne.
Pour lui, Schwaller subit dès 1917 l'influence de Dina, alias Aor Mahamet Aliah, qui, présent dans le cénacle des soeurs Barney, signera avec René une plaquette intitulée Nécessité, destinée aux futurs Veilleurs:
http://www.archerjulienchampagne.com/article-3697984-6.html
http://www.archerjulienchampagne.com/article-4849361-6.html
Pour en venir plus précisément à Julien Champagne lui-même, toutes les photos que je vous propose ce jour, de lui comme de René Schwaller, sont dites par Dufour-Kowalski dater de 1931.
Elles auraient été prises chez les Schwaller, au Mas de Cocagne, près de Grasse. DK note à juste titre "le regard de Champagne, et sa fine perspicacité, dans l'éclair de la rétine". Voici bien un portrait d'Hubert qui ne ressemble pas forcément à ceux que nous avons vus jusqu'alors.
Je n'exclus d'ailleurs pas qu'il s'agisse de notre homme. Mais ces yeux clairs me semblent être une vraie nouveauté. Et puis, comme le souligne encore Emmanuel, "Champagne mourra l'année suivante à Paris". Or cet homme paraît être d'une grande vitalité, et en pleine santé.
Où est l'ivrogne que l'on nous a décrit ici ou là? Comment concilier cette image avec le "Champagne âgé" que nous connaissons par ailleurs? Et même avec le croquis de Schwaller?
Et enfin avec cette citation d'Eugène Canseliet, déjà produite, dans le numéro 15-16 de la revue La tourbe des philosophes, en 1981:
"Le progrès du mal avait été inexorablement lent et douloureux, depuis son début presque soudain, en cette belle journée de 1930."? Nous voici de nouveau, pour reprendre l'expression de l'auteur de La quête alchimique, devant "un mystère."
Et en voici un autre encore, dont le Mas de Cocagne semble regorger:
"C'est là qu'en 1931 et 1932, écrit EDK, auront lieu les dernières tentatives opératoires de l'Opus alchemicum."
Pour lui, elles auraient été couronnées de succès, Schwaller-Fulcanelli conduisant les opérations réalisées par Champagne, et une transmutation aurait eu lieu.
En témoignerait ce ténébreux cliché de "la pierre recouverte de l'enduit de cire, sous l'abat-jour."
Il est vrai que Schwaller, alias Aor, était lui-même un homme secret, à l'instar de cet ésotérisme qui fut finalement le fil conducteur de sa vie. En 1941, il considérait ainsi que la science hermétique est "une synthèse de tous les aspects du monde et de la vie.
Ne serait-elle considérée que dans ce sens, son étude vaudrait la peine. Elle présente une sorte de transmission mystérieuse à travers les temps, les mêmes phrases souvent se retrouvent chez les alchimistes moyenâgeux et dans les textes retrouvés en Egypte."
Et l'année précédente, il affirmait déjà:
"Les cathédrales nous sont plus proches que les temples d'Egypte, croyons-nous. Mais nous sommes indécrottables..."
Quoiqu'il en soit, en 1931 Julien Champagne, sain d'esprit et également ou non de corps, rédige un testament par lequel nous apprenons notamment qu'il compte léguer à Eugène Canseliet son fichier, "qu'il lui destine et où il trouvera des documents et des renseignements utiles pour ses travaux."
Qu'est devenu ce fichier?
pcc ARCHER