Oui, j'espère que Paul Chacornac vit toujours au milieu de ses précieux livres, de tous ceux la "Bibliothèque Chacornac" dont on peut d'ailleurs se demander ce qu'elle a pu devenir.
J'ai voulu acquérir un des ouvrages de Paul que je n'ai pas encore lu, Le comte de Saint-Germain, et j'ai eu le bonheur d'en trouver une édition ancienne (Chacornac Frères, 1947) un peu patinée par les ans, certes, mais cela fait partie de son charme.
La chance m'a d'autant plus souri que mon livre contient une dédicace autographe de l'auteur, et sur lui un article découpé dans un journal non référencé mais qui ressemble à L'Aurore (non, pas le traité alchimique d'Henri de Lintaut, le quotidien de Pierre Lazareff).
Je pense que cet article, assorti d'une photo de Paul Chacornac, est postérieur à 1951. Après mes deux autres courriers sur la famille Chacornac (Champagne au pays Chacornac, 3 juin 2006 et D'Henri Chacornac à Champagne, 26 juillet 2006) voici donc de nouvelles précisions sur cette librairie du quai Saint-Michel qui employa le jeune Julien Champagne, et où en 1905 il rencontra peut-être Fulcanelli.
Le titre de l'article, qui n'est pas signé, est un peu à la mode du temps: Cinquante ans d'occultisme ont fait de Paul Chacornac un guide précieux pour les explorateurs de l'au-delà.
En voici quelques extraits, qui commencent par une visite guidée de la librairie:
"Le visiteur est reçu dans la boutique par Louis Chacornac, et sa soif de connaissance trouve le plus souvent à s'alimenter sur les rayons chargés de livres qui en garnissent tous les murs.
Mais les habitués, les initiés, pourrait-on dire, connaissent le chemin du saint des saints, ce bureau calfeutré où Paul Chacornac travaille au milieu des ouvrages les plus rares, que seuls quelques privilégiés sont admis à feuilleter.
Les Chacornac, originaires d'une très vieille famille du Puy, sont libraires à Paris depuis 1880. Mais ce n'est qu'en 1894 qu'Henri Chacornac, sur les conseils de son beau-père, Jules de Lerminat, commença à s'intéresser aux sciences occultes.
Il fut encouragé et aidé dans sa tâche par les meilleurs occultistes de l'époque, notamment par Albert Poisson et Papus, et par ce grand seigneur bibliophile qu'était René Philippon.
Le jeune Paul Chacornac avait dès l'âge de quinze ans était admis en 1899 à travailler avec son père, auquel il devait succéder à sa mort, en 1908.
Tout ce qui a un nom dans l'occultisme fréquente alors la librairie, et lorsqu'il en prend la direction, il décide d'abandonner ce qui n'est pas ésotérisme. Il établit alors son premier catalogue spécialisé.
Le libraire fait bientôt une large place à l'éditeur. Depuis 1905 déjà les Chacornac éditent une des revues les plus importantes de l'époque, Le Voile d'Isis.
Revue qui paraît encore, sous le titre d'Etudes Traditionnelles que lui a donné René Guénon lorsqu'il en prit la direction en 1936.
Et Paul Chacornac écrit. Il publie en 1926 un remarquable ouvrage sur Eliphas Lévi, bientôt suivi par une étude documentée sur le fameux comte de Saint-Germain.
Entre temps, il s'est passionné pour l'astrologie et compose un ouvrage qui fait depuis autorité: L'Astrologie au XVème siècle.
Il publiera d'ailleurs chaque année ces fameux éphémérides que tous les amateurs d'astrologie connaissent bien.
Aujourd'hui encore, il prépare un important ouvrage consacré à la mystérieuse personnalité du père Yves de Paris, capucin célèbre pour avoir publié en 1654, sous le pseudonyme de François Allaeus, un prophétique traité d'astrologie.
Paul Chacornac a encore bien d'autres projets, mais depuis sa rencontre en 1925 avec René Guénon, il s'est uniquement attaché aux doctrines spriritualistes.
Mort au Caire en 1951, Guénon a laissé un grand nombre d'articles que Paul Chacornac, qui a déjà édité Aperçus sur l'Initation, se propose de réunir en volumes.
Dans la boutique du quai Saint-Michel, cependant, où pénétrèrent tant de célébrités, du docteur Maxwell au colonel de Rochas, continuent de défiler les meilleurs spécialistes de l'occultisme.
Louis Chacornac, qui s'était davantage passionné pour le cyclisme - il fut champion de France en 1911 - que pour l'occultisme, a rejoint son frère dans la vieille maison familiale depuis plusieurs années déjà.
Mais curieusement aucun des trois enfants de Paul Chacornac n'a manifesté jusqu'ici de goût pour l'ésotérisme, qu'il s'agisse de ses deux garçons ou de sa fille.
Personne, cependant, parmi les habitués du vieux bureau encombré de livres ne veut penser qu'un jour ce haut lieu de l'occultisme moderne puisse à jamais disparaître et ses richesses dispersées au hasard de quelque vente."
Hélas...mais Jean ayant bien pleuré, voici revenu le tour de Jean qui rit, où du moins sourit. J'ai pu mettre la main sur le numéro XXXIV de la revue Initiation & Science (1955), où Sonia Bentkowski-Lavritch a écrit une page d'éloge de Louis Chacornac, qui venait de décéder. Après celui de Paul, je voudrais bien pouvoir prononcer également celui de son frère.
Mais pour l'instant me manque un portrait de lui...La charité, messieurs dames, la charité, bonnes gens!
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