Dans son livre Fulcanelli dévoilé (Dervy, 1992 et 1996), Geneviève Dubois affirme que Julien Champagne séjourna un certain temps près de Bourges:
"En 1921 Jean-Julien Champagne est invité à venir travailler sur le tracé d'un plan de réfrigirateur au chateau de Léré, dans le Berry.
Cette demeure appartient à Pierre, l'un des fils de Ferdinand de Lesseps."
Rappelons au passage que Serge Hutin identifiait précisément Fulcanelli à Pierre de Lesseps (revue Le monde inconnu N°118, 1990).
"Le constructeur du canal de Suez, précise Dubois, avait acheté cette propriété laissée à l'abandon avec l'argent provenant de la vente d'un bien situé près de Paris et appartenant à sa belle-mère.
Il fit cultiver les terres, construisit une ferme modèle et restaura le vieux chateau, possession d'Agnès Sorel."
Geneviève a apparemment tiré ces dernières informations d'un article de Ferdinand de Lesseps: Trente ans de ma vie, paru en 1887 dans la Nouvelle Revue. Curieux tout de même, de voir apparaître dans ce paysage la favorite de Charles VII, que l'alchimiste Jacques Coeur fut accusé d'avoir empoisonnée, alors qu'il fut au moins son ami.
A Léré, poursuit Dubois, "J.Champagne enseigne également le dessin. Il utilise aussi, à volonté, le laboratoire mis à sa disposition pour continuer ses expériences alchimiques.
Mais il reste peu de temps dans le Berry puisqu'en 1922 il revient à Paris."
Une autre version de ce séjour dans le Cher de Julien Champagne se trouve dans le "dossier Fulcanelli" du numéro IX des Cahiers de la revue La tour saint Jacques (numéro spécial Parapsychologie, 1962), sous la plume de Robert Ambelain:
"En 1921, Ferdinand de Lesseps fit construire au chateau de Leroi un laboratoire d'alchimie destiné à son propre fils qui commença à y travailler avec Champagne pour maître...
Nous n'avons pu identifier le chateau de Leroi, et ne sommes même pas certain de l'orthographe du nom.
Peut-être s'agit-il du chateau de Leré, dans l'arrondissement de Bourges, qui appartient maintenant à la famille Varenart de Billy...
C'est durant son séjour au château de Leroi, où il était "officiellement" professeur de dessin du jeune de Lesseps, que Champagne connut les sculptures de l'hotel Lallemand (sic), à Bourges...
Combien de temps demeura-t-il au château de Leroi? Nous ne savons, mais il est certain que, arrivé en 1921, il en était parti en 1922."
Dans la même revue, Eugène Canseliet répliquant à Ambelain propose encore une autre orthographe pour ce château, et paraît considérer que Champagne y a résidé plus longtemps que ne le pensent Ambelain et Dubois, avant de rejoindre comme lui la rue Rochechouart à Paris:
"Quant aux livres, ils étaient à peu près absents de sa mansarde qui, probablement, n'avait pas douze mètres carrés de superficie et se montrait fort semblable à la mienne, louée, elle aussi, au retour de Loroy, dans le printemps de 1925."
Relevons enfin le fait que dans son livre paru en 1976, The alchemist of the rocky mountains (Paracelsus Research Society), l'alchimiste américain Frater Albertus (Richard Albert Riedel, 1911-1984) affirme que Fulcanelli opéra en 1937 une transmutation devant témoins au château de Léré, près de Bourges, château qui était alors la propriété de Pierre de Lesseps:
http://homepages.ihug.com.au/~panopus/rockymts/chapt4.htm
Walter Grosse pour sa part, dans son blog consacré à Fulcanelli, estime que Léré appartenait à Paul de Lesseps:
http://www.fulgrosse.com/article-3362253.html
Sur Paul de Lesseps, on pourra se reporter à mon article Champagne et Paul de Lesseps du 23 juillet 2006. Le château de Léré existe bien en tout cas, il est même classé monument historique depuis...1922:
http://www.patrimoine-de-france.org/oeuvres/richesses-23-8092-64309.html#fiche
Cette demeure, oeuvre de la famille de Louzeau, et dite château de Villattes, remonte à la fin du XVème siècle ou au début du XVIème.
Elle est aux dernières nouvelles propriété d'une société privée. Mais je n'ai pu établir pour l'instant de lien confirmé avec la famille de Lesseps.
J'aime beaucoup, en tout cas, ce qui est dit sur le site ci-dessus de son oratoire, aménagé dans la tour d' angle nord-est; il présente un rare décor peint à la fin du XVIIème siècle : dans une architecture de marbre feint, les seigneurs de Villattes invoquent le Saint-Esprit.
Quant à Loroy, située également en Berry, il s'agit en fait d'une abbaye cistercienne du XIIIème siècle, hélas ruinée au cours des guerres de religion.
Alain-Fournier y aurait situé le cadre de l'étrange fête de son roman récemment porté à l'écran: Le grand Meaulnes. "Féérie pour une autre fois", eût conclu Louis-Ferdinand Céline.
ARCHER