Pour un alchimiste, la vie est une, même s'il n'y a pas qu'une vie. Donc non seulement il n'y a qu'un pas de la vie minérale à la végétale (ou à l'animale), mais la vie minérale est par essence animale et végétale.
Et c'est un chant, la vie, une vibration, picturale, musicale notamment. Nous nous trouvons donc maintenant, me semble-t-il, en situation d'admirer ensemble ce très beau tableau réalisé en 1900 par un certain Julien Champagne.
A cette époque, notre « Hubert » vient de terminer ou est en train d’achever son parcours estudiantin à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris.
Nous voici donc, si j’ose dire plantés devant ce qui est encore une œuvre de jeunesse, même s’il est aisé de constater comme le trait s’est en quelques années considérablement affermi, et combien s’est enrichi la palette.
Heureuse trouvaille par conséquent de la talentueuse galeriste de la rive gauche de la Seine, providentiellement nommée, du moins est-ce mon avis, Marie Watteau :
www.mariewatteau.com
http://pagesperso-orange.fr/marie.watteau/Artistes/Pages/Champagne.htm
On pourra si l’on veut admirer rue de Beaune cette belle œuvre, qui attendait encore acquéreur ces jours derniers.
Et certes Marie qui s’est heureusement pour nous faite une spécialité de la fin du XIXème siècle et du début du XXème ne l’a pas dénichée par hasard, puisqu’elle cherche précisément depuis quelque temps à acquérir des dessins ou peintures de Julien, passionnée qu’elle est par le génie de l’auteur du Vaisseau du Grand œuvre (1910). Auteur qui rappelons-le tout de même figure au Bénézit.
Sur cette toile que pour notre part nous avons pu contempler grâce à l’obligeance et à la gentillesse également expertes de Sophie de Saint Phalle, collaboratrice de Watteau, nous ne disposons hélas que de peu d’informations: "Intérieur d'une serre" serait le nom de ce tableau de 54x73cm.
En effet, son dernier propriétaire en date semble ne pas avoir été conscient de la personnalité de Champagne.
Pour autant, et même si le peintre n’a pas apposé au verso de sa toile son cachet de prédilection : « Julien Champagne, artiste peintre », tout simplement peut-être parce qu’il n’en disposait pas à l’époque, sa signature, que nous reproduisons ici en positif et en négatif, et qu’il a fait suivre comme ailleurs parfois de l’année de sa création, témoigne suffisamment à mon sens du fait que nous avons devant nous une œuvre authentique, et jusqu’alors inconnue.
Mais me direz-vous où peut bien se trouver cette belle serre, ce jardin tropical ou jardin d’hiver dont la mode au tournant des deux siècles précités s’était déjà largement affirmée ? Je parierais volontiers pour la région parisienne, qui était après tout la région de prédilection de Jean-Julien.
Et je me plais à penser que nous pourrions nous trouver tout simplement au Muséum d’histoire naturelle de Paris, si cher au grand savant que fut Eugène Chevreul, lequel lui légua d’ailleurs sa collection de livres d’alchimie. Chevreul, qui fut par ailleurs un ami aîné de Fulcanelli.
Mais puisque nous voici en train de remonter dans le temps, je voudrais presque conclure mon petit pensum du mois courant en offrant à Marie et Sophie, en manière de remerciement pour nous avoir obligeamment signalé et fait admirer cette superbe découverte, une reproduction d’un tableau de 1880, cette fois, et qui est une œuvre « orientaliste » de Luc-Olivier Merson.
Convenons ensemble que cette vision qu’il nous propose de la fuite en Egypte de la Sainte Famille est pour le moins inhabituelle.
Luc nous présente donc une vision symbolique ou symboliste, comme on voudra, de cet épisode biblique. Vision qui au demeurant ne nous surprend que partiellement, après notre lecture des quelques lignes que lui consacre Eugène Canseliet dans son édition du Livre Muet.
« Le sphinx protège et domine la science », proclame pour sa part le frontispice fulcanellien du Mystère des Cathédrales, dessiné par Julien Champagne dès 1910.
Et quelle magnifique illustration, également, du caractère œcuménique de la science et de la religion alchimiques !
Je terminerai donc ce petit laïus en vous signalant une œuvre musicale originale de notre cousin du Québec Christopher Cousineau, dont l’Electric Chamber Orchestra s’inspire très régulièrement de l’œuvre de Fulcanelli et de celle de Julien Champagne:
http://www.myspace.com/thecrucibleece
Je trouve qu’elle complète d’heureuse façon ce petit tour d’horizon conjoncturel de l’Art, des arts et de leurs artistes, puisqu’elle s’intitule tout simplement La danse de Sophia :
« La vie, ça se danse. »
pcc ARCHER