La planche IX de l'édition originale du Mystère des Cathédrales, illustré par Julien Champagne, se rapporte à nouveau au porche central de Notre Dame de Paris.
Elle comporte deux médaillons, respectivement intitulés Le Corps Fixe et Les matériaux nécessaires à l'élaboration du Dissolvant.
Commençons par Le Corps Fixe, et écoutons la leçon de Fulcanelli à son propos:
"Nous voici maintenant en face d'un symbole fort complexe, celui du Lion. Complexe parce que nous ne pouvons, devant la nudité actuelle de la pierre, nous contenter d'une seule explication.
Les Sages ont adjoint au lion divers qualificatifs, soit afin d'exprimer l'aspect des substances qu'ils travaillaient, soit pour en désigner une qualité spéciale et prépondérante.
Dans l'emblème du Griffon (huitième motif), nous avons vu que le Lion, roi des animaux terrestres, représentait la partie fixe, basique d'un composé, fixité qui perdait, au contact de la volatilité adverse, la meilleure partie d'elle-même, celle qui en caractérisait la forme, c'est-à-dire, en langage hiéroglyphique, la tête.
Cette fois, nous devons étudier l'animal seul, et nous ignorons de quelle couleur il était originellement revêtu. En général, le Lion est le signe de l'or, tant alchimique que naturel; il traduit donc les propriétés physico-chimiques de ces corps. Mais les textes donnent le même nom à la matière réceptive de l'Esprit universel, du feu secret dans l'élaboration du dissolvant.
Dans ces deux cas, il s'agit toujours d'une interprétation de puissance, d'incorruptibilité, de perfection, comme l'indique assez, d'ailleurs, le preux à l'épée haute, le chevalier couvert du haubert de mailles, qui présente le roi du bestiaire alchimique.
Le premier agent magnétique servant à préparer le dissolvant, - que certains ont dénommé Alkaest, - est appelé Lion vert, non pas tant parce qu'il possède une coloration verte, que parce qu'il n'a point acquis les caractères minéraux qui distinguent chimiquement l'état adulte de l'état naissant...
Quant au Lion rouge, ce n'est autre chose, selon les Philosophes, que la même matière, ou Lion vert, amenée par certains procédés à cette qualité spéciale qui caractérise l'or hermétique ou Lion rouge...
De ces interprétations, quelle est la véritable? - C'est là une question que nous avouons ne pouvor résoudre. Le lion symbolique était, sans aucun doute, peint ou doré. Quelque trace de cinabre, de malachite ou de métal viendrait aussitôt nous tirer d'embarras. Mais il ne subsiste rien, rien que le calcaire rongé, grisâtre et fruste. Le lion de pierre conserve son secret!"
A cette constation pessimiste en apparence, le médaillon suivant permet aussitôt d'apporter un correctif, dont il nous faut noter en passant que la glose fulcanellienne précède en fait celle rapportée ci-dessus:
"Le neuvième sujet nous permet de pénétrer davantage le secret de la fabrication du Dissolvant universel.
Une femme y désigne, - allégoriquement, - les matériaux nécessaires à la construction du vaisseau hermétique; elle élève une planchette de bois, ayant quelque apparence d'une douve de tonneau, dont l'essence nous est révélée par la branche de chêne que porte l'écusson.
Nous retrouvons ici la source mystérieuse, sculptée sur le contrefort du porche, mais le geste de notre personnage trahit la spiritualité de cette substance, de ce feu de nature sans lequel rien ne peut croître ni végéter ici-bas.
C'est cet esprit, répandu à la surface du globe, que l'artiste subtil et ingénieux doit capter au fur et à mesure de sa matérialisation.
Nous ajouterons encore qu'il est besoin d'un corps particulier servant de réceptacle, d'une terre attractive où il puisse trouver un principe susceptible de le recevoir et de le "corporifier."
"La racine de nos corps est en l'air, disent les Sages, et leurs chefs en terre."
Du dissolvant universel, il est encore abondamment question dans l'ouvrage consacré par Eugène Canseliet au Livre Muet (Pauvert, 1967), où il revient également sur l'énigme du lion, "symbolisant le soufre."
Pour lui, de même, commente-t-il dans le même livre, les lions vert et rouge représentent le double principe sulfureux, et sont appelés à la réunion sous le signe d'Apollon.
http://maxjulienchampagne.over-blog.it/article-julien-champagne-a-l-alkaest-83879020.html
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