Dans son oeuvre publiée, Eugène Canseliet mentionne par deux fois le nom d'Alexandre Thomas.
Il explique ainsi dans Le feu du soleil (Pauvert, 1978):
"La librairie de Pierre Dujols avait disparu, de même que la Librairie du Merveilleux, où avait officié Thomas, qui mourut, le pauvre, avec tous les pantalons rouges de 1914.
Jean Julien Champagne avait été très lié avec Alexandre Thomas."
Dans un article de février 1936 paru dans la revue Atlantis: Le feu purificateur et son messager apocalyptique, repris en 1964 dans son recueil intitulé Alchimie (Pauvert), Eugène Canseliet avait en fait déjà fait référence à cet associé de Pierre Dujols, à propos de la réédition par ce dernier de l'ouvrage de Duchanteau (Touzay, peintre de profession), Le Grand Livre de la Nature:
"Cet ouvrage a été réédité en 1910 avec une introduction d'Oswald Wirth, par Pierre Dujols, à savoir Magophon, qui devait rédiger sa remarquable Hypotypose au Liber Mutus, lorsqu'il était à sa Librairie du Merveilleux, hélas! bientôt fermée par le départ sans retour de l'infortuné Thomas, pour l'hécatombe épique de 1914."
Cet Alexandre Thomas, en fait prénommé Albéric-Alexandre, aussi connu sous le pseudonyme de Marnès, était un martiniste et un franc-maçon de l'ordre égyptien de Memphis-Misraïm. Dans l'ouvrage que Gérard Galtier a consacré à la Maçonnerie Egyptienne (Editions du Rocher, 1989), on trouve une planche sur la Grande Loge Misraïmite en 1897-1898.
Le Vénérable en est Abel Thomas et son frère Albéric en est Secrétaire. Ils s'y trouvent d'ailleurs en excellente compagnie: Chacornac, Lalande, Philipon...
Pierre Dujols et Thomas ont travaillé en 1909 à l'édition des Sept Livres de l'archidoxe magique de Paracelse – livre qui sera publié sous les auspices de l'Ordre kabbalistique de la Rose-Croix. À l'époque, suite à l'affaire de l'Ordre du Temple rénové, ces deux hommes sont en froid avec Papus.
En 1908 en effet, au cours d'une séance de spiritisme effectuée dans un hôtel situé au 17 de la rue des Canettes, ils reçoivent pour mission, par écriture directe, de fonder un ordre templier dont René Guénon sera le chef. Ainsi naît l'Ordre du Temple rénové, dont la création sera la cause en 1909 de l'exclusion de René Guénon et Thomas de l'ordre martiniste de Papus. L'Ordre du Temple sera dissout en 1911, quand Dujols tombe gravement malade.
Outre Oswald Wirth, Paul Chacornac, Sédir, René Guénon et Ferdinand de Lesseps, entre autres, étaient membres de la Loge Misrainite, dite de L'arc-en-ciel.
Le frère d'Alexandre, Abel Thomas, en était le Vénérable. C'est lui, explique Geneviève Dubois dans son Fulcanelli dévoilé, qui fit pression pour que soit rejetée la candidature de Papus. Ce dernier avait pourtant nommé Abel Thomas "professeur titulaire" de sa Faculté libre de sciences hermétiques.
Sur les relations multiples et parfois tumultueuses des frères Thomas avec le milieu "papusien", on pourra consulter également avec profit l'excellent ouvrage Papus, biographie, de Marie-Sophie André et Christophe Beaufils (Berg, 1995).
En 1909, Guénon (Palingénius) et Marnès créèrent la revue La Gnose, éditée par la Librairie du Merveilleux, et qui devait paraître jusqu'en 1912. Plusieurs numéros de cette revue feront une large place à L'archéomètre de Saint-Yves d'Alveydre, abondamment annoté par les deux compères.
En 1911 cette revue, dont l'intégralité des livraisons a été opportunément publiée en 2009 par les éditions de l'Homme libre, a proposé à ses lecteurs un certain nombre d'articles sur l'alchimie, dus en partie à Patrice Genty (Mercuranus): L'alchimie pratique, Quelques recettes alchimiques, et en partie à Marnès: Le mystère de la croix.
Si Alexandre Thomas a été un ami de Julien Champagne, il est plus que probable que son frère Abel l'a été également.
Abel Thomas, dont une photo figure ci-dessus, était un astrologue connu. Il porte également le nom de plume d'Abel Haatan. Son maître en astrologie était Albert Faucheux, plus connu sous le nom de François Charles Barlet (1838-1921).
Le Traité d'astrologie judiciaire d'Abel Thomas fut publié par Chamuel en 1895. En 1905, Abel Haatan, qui était aussi pharmacien et chimiste, publia chez Chacornac un essai intitulé: Contribution à L`Etude De L'Alchimie. Théorie Et Pratique Du Grand Oeuvre. Ce livre, dont un exemplaire au moins fit partie de la bibliothèque de Julien Champagne, a été réédité en 2004 par MCOR-Christienne:
http://stores.ebay.fr/La-Table-dEmeraude
http://touscesgens.hautetfort.com/archive/2006/08/20/les-deux-freres-thomas.html
En 1911, on retrouve Abel Haatan parmi les principaux collaborateurs de la revue Le Voile d'Isis, fondée par Papus en 1890 (ainsi que Jules Grillot de Givry, Marc Haven, Paul Sédir...).
D'après Richard Caron, dans son article sur L'histoire de l'alchimie en France à la fin du XIXème siècle (in Mélanges offerts à Antoine Faivre, Peeters, Leuven, Belgique, 2001), Abel Haatan est comme Jacob (Jean-Jacques Bourcart), l'auteur d'un commentaire sur le poêle alchimique suisse de Winterthur. Pour lui les deux essais furent publiés presque en même temps, et celui d'Haatan, paru à Zurich en 1896, s'intitulerait Révélation alchimique, par les peintures d'un poële de fayence, 22 mars 1896.
Il est vrai que les deux hommes se connaissaient, et furent entre autres des relations de Paul Sédir et d'Albert Poisson.
Signalons enfin cette belle dédicace, offerte par Simplet, d'un ouvrage publié par Pierre Dujols et Alexandre Thomas (Les sept livres de l'archidoxe magique, de Paracelse, commentés par Marc Haven, 1909) à l'administrateur de la bibliothèque parisienne Sainte Geneviève, si riche en ouvrages alchimiques: Charles-Alfred Kohler, d'origine suisse genevoise (1854-1917).
http://maxjulienchampagne.over-blog.it/article-champagne-amico-dei-fratelli-thomas-35788608.html
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